Et des vies qui trop tôt dessinent un dessein funeste, ta vie pareille à la mienne t'enjoins de sonner le glas alentours. Ne pas ébruiter pour ne pas affoler, tu dis vouloir te battre quand le reste de ta vie ne se profile plus que sur quelques années.
De toi dans un combat usant pour grapiller quelques mois toutefois gaspillés à l'hopital, ou de moi femme-autruche refusant toute consultation pour ne plus savoir que l'espoir est mince, lequel aurait raison.
D'aucun puisque fatalement, nous combattons un destin qui somme toute reste le même au commun de mortels et dès lors à quoi bon se battre?
Mais secrètement, ton choix me réchauffe et tes instants les plus durs comme tes instants les plus doux, je les passerai à tes côtés.
J'ai choisi de ne pas me battre. Grand bien m'en fasse je serai affaiblie dans ma bataille, peu présentable, je laisserai le souvenir de quelqu'un de malade, mourant, je passerai ma vie dans des hopitaux et eux me surveilleraient des que je m'en eloigne. Je ne voulais pas tuer 5 années pour en gagner 2. Moi j'ai l'espérance d'une trentaine, même d'une quarantaine d'années et je trouve ca deja bien long. Surtout désormais quand je sais que retarder mon depart d'ici retardera le jour où je t'attraperai la main à nouveau, car assurément, toi, tu seras dejà parti.
Je fais ma vie avec lui, je vis ma mort avec toi. Tu es mon cadeau, une offrande que l'on me fait. Je faisais l'autruche condamnée dans ma vie, enfermée dans ma mort.
Tu me laisses le loisir d'y penser, tu es mon excuse dans ma fatalité. Tu es la moitié de l'ombre que je sais être. Tu portes la condamnation dans ton regard, ta maladie dans tes chairs faibles, tes os las, tes joues creuses, tes cernes envahissantes. Tu portes ma maladie sur tes épaules frêles, quand je supporte ta douleur dans mon coeur malade, que j'ai au bord des lèvres, prête à vomir un trop plein d'amour que j'ai eu pour toi le premier jour, la première nuit, que j'aurais le dernier jour la dernière nuit. Et elle approche.
Je porterai dans un coeur que je te dis ne pas posséder les miettes de toi qui glissent de nos nuits, que je vole dans une caresse à tes cheveux, que je dérobe dans le noir d'une chambre d'hotel au bord de ton cou. Et de baisers avortés, toujours trop courts, toujours furtifs, souvent refusés, je crée de toi mon album photo, celui que je feuilleterai intérieurement avant de donner mon dernier souffle. Pour être sur de te reconnaitre à l'aurée du paradis ou sur le seuil de l'enfer comme tu aimes à penser. Nos vies trop misérables, trop enfermées dans une pièce qu'on nomme "mort annoncée" nous ont menés aux pires excès. Envolés dans nos poussières de rêves, embués dans nos fumées de délires, noyés dans nos boissons de fêtes, toute drogue nous a semblée bonne à prendre pour mieux oublier, ou mieux se rappeler.
On ne savait pas l'un pour l'autre au début, mais quelque chose nous avait rapproché malgré nous. Fut-ce t-elle la mort que ca n'a plus aujourd'hui aucune importance. Puisque tu es mien désormais et que je suis tienne.
J'observe à la dérobée tes éclats de rires quand tes yeux même plissés portent la couleur de la fin approchante. Je nous compare toi dans un simulacre de vie pour ne pas dépérir, moi dans mon mutisme d'autant plus mortel que je ne ferai plus que ca bientôt. Attendre de te rejoindre. Parce que je n'ai jamais aimé. Ni jamais ressenti pour quiconque ce que mon coeur te hurle. Un coeur que nous nous obstinons à nous cacher l'un à l'autre quand nos corps impudiques se livraient sans problème dès le premier soir.
Je n'aime pas. J'appartiens.
Je t'appartiens.
Je suis à toi.
Dim 16 Mar - 3:04